
Dans le langage courant des chasseurs, une confusion persiste autour de deux moments bien distincts du comportement de la bécasse des bois : la croule et la passée. Une erreur de vocabulaire qui peut prêter à confusion, mais qui mérite d’être clarifiée, surtout lorsqu’elle touche à des aspects réglementaires.
Il n’est pas rare, à l’aube ou au crépuscule, qu’un chasseur témoigne de la vision fugace d’une bécasse volant à base altitude avec un vol rectiligne. L’on entend alors souvent : « Il est interdit de la tirer à la croule ! » Pourtant, si le fond de l’observation est juste – il est en effet interdit de prélever une bécasse dans ces conditions – la forme, elle, est erronée : ce que le chasseur a observé, c’est une passée, et non une croule.
Une bécasse à la passée : un vol crépusculaire classique
La passée, chez la bécasse, désigne ces moments de vol qui ont lieu au lever ou au coucher du soleil, quand l’oiseau quitte ses zones de repos diurnes pour gagner ses lieux de nourrissage nocturnes. Ce comportement n’est pas sans rappeler celui des canards ou des pigeons, qui suivent un schéma similaire. Ces vols, réguliers dans leur horaire comme dans leur tracé, sont bien connus des chasseurs.
Il va sans dire que dans ces moments-là, la bécasse est plus facile à repérer, et potentiellement à tirer : son vol est plus tendu, plus direct, souvent dans des zones plus dégagées. Justement pour cela, et pour éviter toute forme de chasse opportuniste ou peu sportive, la loi interdit formellement le tir de la bécasse à la passée.
La croule : un ballet nuptial réservé au printemps
Rien à voir, donc, avec la croule. Ce terme spécifique désigne un comportement tout à fait particulier des mâles en période de reproduction. À partir de la fin février et durant le mois de mars, les bécasses mâles entament un vol typique au ras des clairières ou des lisières, à la recherche de femelles prêtes à s’accoupler.
Ce vol est accompagné de sons caractéristiques : une alternance de roucoulements discrets et de petits sifflements secs, souvent décrits comme un « crou-crou » suivi d’un « pcht ». Ces manifestations sonores sont autant d’appels nuptiaux que d’avertissements territoriaux à destination d’éventuels rivaux.
Une fois l’accouplement consommé – après une courte parade au sol – le mâle reste brièvement auprès de la femelle, le temps que celle-ci commence sa ponte, avant de reprendre ses vols de croule, chaque soir.
Une pratique interdite chez nous, tolérée ailleurs
Dans certains pays, moins regardants sur l’éthique ou la préservation de l’espèce, la chasse pendant la croule est encore pratiquée. On parle alors de chasse à la croule, un mode de chasse que la réglementation française interdit formellement.
Et pour cause : la chasse à la bécasse en France se clôture au 20 février, soit avant le début des vols nuptiaux. Par conséquent, ni la passée ni la croule ne sont des occasions de tir légales en fin de saison.